La société civile togolaise est indignée après l’interdiction par les autorités d’une marche pacifique destinée à honorer les victimes des récentes violences politiques. Dans une lettre ouverte cinglante adressée au ministre de l’Administration territoriale, une coalition de plus de vingt ONG accuse le gouvernement de « réprimer la douleur collective » et d’appliquer une dangereuse politique de deux poids, deux mesures en matière de rassemblements publics.
L’événement commémoratif, organisé par Novation Internationale et soutenu par des groupes de premier plan comme Togo Debout et Tournons la Page Togo, prévoyait de tracer un itinéraire symbolique reliant Bè-Kodjindji au parc Lavista. La marche visait à créer un espace de réconciliation nationale après des mois de manifestations meurtrières. Mais le gouvernement l’a bloquée à deux reprises : d’abord en invoquant des processus électoraux en cours, puis en changeant brusquement de raisonnement pour affirmer que le parcours traversait des « lieux stratégiques à fortes activités économiques ».
Des excuses changeantes suscitent l’étonnement
Les dirigeants de la société civile ne croient pas à ces explications. « Dans tous les pays où la dignité humaine est respectée, il est de devoir d’honorer la mémoire des morts » demandent-ils dans leur lettre. Les organisations pointent du doigt une tendance inquiétante : les célébrations publiques se déroulent sans entrave, tandis que les tentatives de commémoration des victimes se heurtent à des obstacles bureaucratiques soudains.
Les ONG affirment que l’interdiction viole deux dispositions constitutionnelles clés : l’article 11 sur la dignité humaine et l’article 30 garantissant le droit de manifester. « Chaque nouveau courrier fait état d’un nouveau grief. Comme si l’objectif n’était plus d’assurer l’ordre public, mais de trouver à tout prix un prétexte pour bloquer une activité légitime », affirme la lettre.
L’accusation la plus percutante ? Les autorités « effacent la mémoire » pour éviter de rendre des comptes. « À quoi sert-il de parler de réconciliation, si même les morts ne peuvent reposer en paix accompagnés de leurs frères et sœurs en citoyenneté ? », demande la lettre.
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Les groupes avertissent que cette approche brutale ne se contente pas de faire taire les protestations, elle empêche le Togo de panser les blessures collectives qui, si elles ne sont pas traitées, pourraient s’envenimer et engendrer des divisions plus profondes.