Le Togo pourrait-il bientôt rejoindre l’Alliance des États du Sahel (AES), la coalition formée par le Mali, le Niger et le Burkina Faso ? Selon le ministre togolais des Affaires étrangères Robert Dussey, ce n’est « pas impossible ».
Cette déclaration a suscité de nombreuses spéculations sur les motivations du Togo. S’agit-il d’intérêts économiques, d’alignement politique ou des deux ? Le professeur Théodore Holo, ancien ministre béninois des Affaires étrangères et président de la Cour constitutionnelle, a partagé ses réflexions avec RFI.

Intérêts économiques en jeu
Selon l’ancien ministre béninois, l’un des principaux facteurs qui motivent l’intérêt du Togo pour l’AES est d’ordre économique. Depuis la fermeture de la frontière entre le Bénin et le Niger, le port de Lomé est devenu une alternative essentielle pour le commerce du Niger.
Ce changement a considérablement renforcé la position économique du Togo dans la région. L’adhésion à l’AES pourrait renforcer davantage cet avantage, en garantissant que le Togo reste un pôle commercial vital pour les pays sahéliens enclavés.
« Pour aller du Togo au Niger, il faut traverser non seulement le Togo, mais il faut aussi traverser le Burkina Faso. Vous savez qu’il y a des difficultés militaires en raison de l’insécurité qui y règne, ce qui fait que les commerçants se sentent un peu pénalisés. Et il y a des protestations à raison du renchérissement du coût des produits qui sont importés. Ce qui veut dire qu’il va falloir garantir la sécurité de ce corridor. Cela prendra du temps, mais si la volonté politique y est, ils y arriveront« , a déclaré Le professeur Théodore Holo.
Convergence politique ou lutte pour la souveraineté ?
L’AES est souvent décrite comme une « coalition souverainiste », dont les États membres rejettent l’influence étrangère, en particulier celle de la France. L’alignement potentiel du Togo sur cette idéologie soulève des questions sur sa relation avec la CEDEAO, le bloc régional auquel il appartient actuellement.
Cependant, Holo prévient que blâmer la France pour les politiques de la CEDEAO pourrait être une simplification excessive, en particulier lorsque les désaccords internes, comme l’opposition du Togo à la limitation des mandats, jouent un rôle important.
« Je voudrais rappeler que la limitation des mandats est un élément de convergence, au niveau de la Cédéao, qui fait blocage parce qu’il y a des pays comme le Togo qui s’étaient opposés à cette limitation des mandats« , a-t-il rappelé.
Et d’ajouter : « Alors quand on vient me dire que la Cédéao est instrumentalisée par la France, je trouve que c’est un argument très facile quand on ne veut pas accepter certaines exigences du point de vue de la démocratie ou du point de vue de l’alternance, du point de vue de la limitation des mandats. Et c’est sur la base de ce refus que des pays comme le Mali, comme le Burkina Faso se sont retirés aujourd’hui de la communauté. »
Quelle est la prochaine étape pour le Togo et va-t-il rejoindre l’AES ?
Alors que le président Faure Gnassingbé évalue ses options, la décision de rejoindre l’AES pourrait avoir des conséquences de grande portée.
Sur le plan économique, elle pourrait renforcer la position du Togo en tant que plaque tournante du commerce régional. Sur le plan politique, elle pourrait signaler un changement vers une politique étrangère davantage axée sur la souveraineté. Cependant, cette décision n’est pas sans risques, notamment en matière de sécurité et de diplomatie régionale.
Pour l’instant, tous les regards sont tournés vers le président Faure Gnassingbé, dont la décision façonnera l’avenir du Togo au Sahel et au-delà.
Source : RFI
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