Le président béninois Patrice Talon s’est récemment longuement exprimé sur la scène politique nationale lors d’un entretien exclusif diffusé sur la télévision publique.
Face au journaliste Serge Ayaka, le chef de l’État est revenu sans détour sur son conflit persistant avec son prédécesseur Boni Yayi, ainsi que sur les conséquences de cette rivalité sur la vie politique du pays. D’un ton ferme, Patrice Talon a reconnu que la situation actuelle du Bénin « porte atteinte à son image », tout en rejetant la responsabilité de ce climat tendu sur Boni Yayi.
Selon lui, depuis 2016, l’ancien président s’opposerait systématiquement à toutes les réformes engagées, bloquant le processus de modernisation du système partisan. Talon affirme pourtant avoir tendu la main à son aîné dès son arrivée au pouvoir, proposant une collaboration ouverte aux Forces Cauris pour un Bénin Émergent (FCBE).
Mais face au refus répété de Boni Yayi et à la fracture politique qui s’en est suivie, l’ancien homme d’affaires estime que l’opposition a volontairement saboté l’unité nationale. Il évoque également les violences électorales de 2019, qu’il impute directement à son prédécesseur, l’accusant d’avoir empêché la tenue d’un scrutin apaisé et d’avoir plongé le pays dans une crise politique sans précédent.
Reconnaissant toutefois que cette guerre personnelle ne profite à personne, Patrice Talon a exprimé son souhait de voir les tensions s’apaiser avant la fin de son mandat. « Notre relation nuit au Bénin », a-t-il déclaré, regrettant que leur querelle ait fini par dominer le débat politique national.
Il appelle désormais à une nouvelle ère où ni lui, ni Boni Yayi ne pèseraient plus sur la scène politique, proposant même une loi interdisant aux anciens présidents d’exercer toute activité partisane. Talon rêve d’un avenir où les anciens chefs d’État, à l’instar de Nicéphore Soglo, joueraient un rôle de sages plutôt que d’acteurs politiques.
Cette volonté de tourner la page prend tout son sens au regard de leur histoire commune : deux alliés devenus ennemis jurés. Jadis complices, leur relation s’est effondrée après les affaires judiciaires de 2012, poussant Talon à l’exil avant son retour triomphal en 2016.
Malgré plusieurs tentatives de réconciliation, notamment sous l’impulsion d’Alassane Ouattara et de Faure Gnassingbé, la fracture demeure. En rompant enfin le silence, Patrice Talon semble vouloir solder définitivement les comptes d’une rivalité qui, depuis plus d’une décennie, cristallise les tensions au sommet de l’État béninois.