Dans une interview exclusive diffusée sur France 24, le 27 juin 2025, Aamron, le rappeur et activiste togolais, s’est exprimé pour la première fois après sa libération, qui a eu lieu le 21 juin 2025.
Son arrestation violente dans la nuit du 26 mai 2025, suivie de son internement en hôpital psychiatrique, avait suscité une vague de protestations populaires, notamment en raison des accusations de torture et de violations des droits humains. Le jeune artiste, devenu un symbole de la lutte pour la liberté d’expression au Togo, a partagé son témoignage sur les circonstances de son arrestation, le traitement qu’il a subi, et son avenir en tant qu’artiste engagé.
Une arrestation violente : « Je savais pourquoi ils étaient venus »
Aamron a raconté les détails de son arrestation, survenue dans la soirée du 26 mai 2025. Il explique que ce jour-là, il avait été alerté par sa femme qu’un groupe de militaires ou d’hommes armés était venu à son domicile. Dès l’instant où sa femme l’a averti, il a immédiatement su que son arrestation était imminente. Il a d’ailleurs préparé sa famille à cette situation, ayant été informé la veille de l’intention de certains responsables locaux de l’arrêter et de l’interné dans un asile psychiatrique.
« J’ai demandé s’ils étaient venus pour moi, ils ont confirmé, mais ils étaient sans mandat », a expliqué le rappeur. Malgré l’absence de documents légaux, il a accepté de les suivre pacifiquement, pensant que sa situation serait rapidement régularisée. Mais il a été choqué par la suite des événements. Dès son arrivée au service central de recherche et d’investigation criminelle (SCRIC), il raconte avoir été » battu et menotté« , et les autorités l’ont menacé de représailles sévères.
Torture et traitements inhumains endurés par Aamron
Le rappeur a raconté avec douleur les sévices physiques qu’il a subis lors de son passage au SCRIC. Il dit avoir été passé à tabac au niveau des plantes des pieds avec une violence inouïe. Les forces de sécurité l’auraient tabassé, et il décrit encore aujourd’hui des séquelles physiques : « J’avais les pieds enflés, les nerfs de mes pieds avaient éclaté, et je garde encore des stigmates.«
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« On m’a fait me déshabiller, puis m’ont placé dans une cellule, où j’ai passé la nuit. Le lendemain matin, ils m’ont fait signer un PV sans avocat. »
Cet enchaînement de violences physiques et psychologiques a conduit Aamron à se retrouver interné en hôpital psychiatrique de Zébé, contre son gré. Lors de son internement, Aamron décrit les deux premiers jours comme étant « difficiles« . Il a été forcé de subir des injections, des sérums, et des comprimés, ce qui a altéré sa perception de la réalité.
« Les deux premiers jours, j’ai perdu un peu le sens de la réalité, je ne savais plus ce que je disais, je me sentais déphasé. »
La vidéo d’excuses : « Je l’ai faite sous contrainte »
Cependant, après trois jours, les traitements ont été modifiés et ont cessé d’être aussi agressifs. Ce changement a permis lui de reprendre conscience de son état. Malgré son état fragile, il a commencé à se rendre compte de l’impact de son sacrifice, de la mobilisation populaire qui a suivi, et de l’importance de sa libération pour la cause nationale.
Aamron a également évoqué une vidéo d’excuses qu’il a été forcé de faire, dans laquelle il présentait des excuses au président du Conseil. Selon lui, cette vidéo a été faite sous contrainte. Il avait demandé à ce qu’il puisse retourner chez lui avant de s’exécuter, mais les autorités ont insisté pour qu’il le fasse immédiatement.
« J’ai demandé à faire la vidéo, mais je voulais d’abord rentrer chez moi. Ils ont refusé et m’ont obligé à faire la vidéo sur place, sous menace », a-t-il narré. Il a insisté sur le fait que ces excuses étaient un acte forcé, et non le reflet de son véritable ressenti.
Malgré les abus qu’il a subis, le rappeur dit être resté déterminé à continuer à dénoncer l’injustice. Il a clairement exprimé son désir de poursuivre son combat pour la liberté d’expression et l’égalité au Togo. Il a réaffirmé son engagement à faire respecter les droits humains et à continuer à lutter pacifiquement contre les injustices.